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20/08/2011

IL EUT FALLU…

La féria de Béziers avait l’avantage de fonctionner selon un brassage de foule sympathique. Pierre Bourdieu aurait dit “un habitus référentiel de classe moyenne”. Hélas, cet avantage se délite à la vitesse grand V.
Aux arènes d’abord - si  tant est qu’elles ne soient pas devenu un alibi!- le spectateur moyen s‘avérait  en ces temps bénis un aficionado moyen, mais conscient de l’être. Il assistait à des courses qui se situaient entre Eauze et Nîmes, avec de temps à autre un après midi d’exception. Pour rester à ce niveau, il eut fallu…
Vendredi, il eut fallu des toros qui ne s’éteignent pas dès la troisième passe malgré des piques allégées, une présidence plus apte à discerner les qualités et les défauts tout en restant honnête, un public moins amorphe malgré son nombre, une musique moins bal champêtre qui endormait les gradins. Ponce esquissa quelques passes de qualité, tenta quelque chose sans parvenir à réveiller des bêtes, certes bien présentées, mais sans continuité et sans malice. Même les grands artistes exigent de bons pinceaux  El Juli ne fit pas mieux même s’il fit différent, plus toréro de public que le valencian. Il « fit le métier » sans enthousiasme et sans enthousiasmer. Castella, toujours un peu crispé dans sa ville natale, tenta des choses, mais pas toujours très appopriées. Par trois fois il se fit enlever à cause de ces errements dont il reste prisonnier. Suerte, «la madone» lui permit d’éviter le pire. Les oreilles distribuées forfaitairement par un palco hors jeu ne sont qu’anecdotiques.

Samedi, Castella en saumon et or, sans doute mâché par ses cogidas précédentes, Mazanares en chocolat au lait sans doute meurtri par ses péripéties dacquoises, Diaz en ivoire limpio,  l’affiche s’avérait engageante. Le lot de Nuñez del Cuvillo sortit homogène, bien présenté, brave à la pique (au singulier) mais, hélas, sans présenter de danger majeur pour les figuras. Le colombien présenta une copie propre quoique dénuée d’intérêt. La mayonnaise, déjà un peu fadasse, ne prit pas. Castella voulut passer à la vitesse supérieure via quelques séries appréciables, sans vraiment arracher l’adhésion des gradins pourtant prêts à se donner au premier maestro venu. A l’épée, la prestation fut correcte. Les oreilles généreuses couronnèrent une faena gauchère déficitaire. Reste Manzanares dont on apprécia le poignet et le temple lors de séries de derechazos «allongés» et de naturelles profondes méritant AAA+. Qualités qui déclassaient son concurrent local en AA+ selon les critères d’actualité. Au premier exemplaire sa tentative louable d‘estocade al recibir échoua dans une atraversado pitoyable au son d’un avis discutable. Il se rattrapa au dernier (qui méritait une vuelta si le palco avait tenu son rôle) par une estocade de grande qualité après un joli travail aidé par l’allant du bicho. La musique fut tout aussi insipide, allant même jusqu’à dégrader le travail en piste au lieu de le sublimer. Un après midi d’occasions manquées. Avec les toros plus agressifs, avec un public plus allègre, avec une peña boostante, avec une présidence plus pertinente, …

Dimanche, j’ai zappé l’après midi d’auto promotion du prince des Montilles, à l’instar de beaucoup de biterrois irrités de son défaut de déontologie. Mais sans doute le mundillo ne se plie plus à ces valeurs dites surrannées au regard des euros à rentrer. La tradition (chemises, chapeaux et accolades) s’arrête aux limites du tiroir caisse ! Bien m’en prit puisque pressé de parvenir à la première pique «contractuelle», la direction stopa le spectacle au motif d’un orage dont il ne fallait pas être fin météorologue pour juger de sa brièveté. La foule spoliée protesta en vain dans un désordre dantesque. On ne rigole pas avec la monnaie, messieurs dames, vous n’aviez qu’a lire les petites lettres au dos du ticket que vous avez payé si cher ! Il est dit «cas de force majeure» clause aussi floue que la vigueur de l’orage alibi. Circulez, il n’y a rien à voir ! Qu’entends-je ? Que fait-on des toros économisés ? Mystère! C’est l’avantage d’être à la fois organisateur et fournisseur de bétail. Les règlements concernant ce point sont obscurs voire ésotériques?… Mieux, ils n’existent pas. Que ceux qui trouvaient le bouquin de Pierre Traimond excessif sur les errements du «marché» tauromachique fassent amende honorable ! La réalité est bien pire ! Toutefois le téléphone ayant dû chauffer dans la soirée (politiques, juristes, assureurs, conseilleurs d’image,…) au domaine de Robert Margé, Margé Robert joua grand seigneur en remettant la (une?) course à septembre. La double casquette était sans doute trop risquée pour utiliser la clause règlementaire. Olé!!Illustration-theme-feria.jpg
Restait lundi 15 août, muriada annoncée. Il eut fallu de vrais Miura! Or, hormis l’allure et les armures respectables, les pensionnaires de Zaharique se montrèrent inaptes à offrir un jeu suffisant. Juan Jose Padilla (rose indien et noir), s’il banderilla fort correctement, montra peu de rigueur. Inconsistant à son premier qui avait tout compris au bout de cinq minutes, agité à son second, maintes fois désarmé, incapable d’enchaîner des passes dignes de ce nom, JJP ressemble de moins en moins à un matador et le fait d’accepter d’affronter les Miuras n’excuse pas tout. Rafaelillo (vermillon et or), désavantagé par sa petite taille, s’efforça de faire de son mieux. Sautillant à son premier il réussit à faire illusion… et à convaincre la présidence. A son second il fit une prestation qui doit se situer autour ce qu’il peut réussir de mieux, à son échelle. Ivan Garcia (lie de vin et or) transparent et apeuré à son premier, dessina au dernier toro de la féria, qui était le seul à avoir de l’allant, des gestes de bonne facture faisant apparaître des qualités de maestro. Rideau!

Maigre bilan tauromachique! Seul moment curieux, les chants “a poder poder” de la Grenouille contrant par “Si cantos” local, la “Coupo santo” provençale officielle importée par Raymond Couderc.
Sorti des arènes, la feria devient nimoise, c’est à dire fracturée en deux: bodegas chicos à quarante euros (off wine) le menu, aspirant la gentry friquée d'un côté et, de l'autre, le tout venant confronté à la nourriture dégueu et à la bière insipide sous les baffles hurlantes à fond la caisse. Fini l’habitus évoqué plus haut.

Même le match de rugby “de gala” sombra dans le ridicule d’un affrontement sans poussée en mêlée!! A Béziers! Pensez un peu aux spectateurs ayant correctement payé leur place à qui on a servi un entrainement avec opposition! Jules Faigt le sénateur socialiste, vénérable supporter de l’ASB old fashion, récemment décédé et à qui cette mascarade était dédiée, ne dût pas s’en remettre, la-haut!
Tout fout le camp, ma pauvre dame! Et à deux euros cinquante le fino, ce n’est pas donné!

07/08/2011

LA FIN DES DINOSAURES OVALES

Albert Ferrasse n’a pas été, pendant longtemps, le copain des biterrois. On l’accusait d’agenisme prononcé, comme on avait accusé Roger Leroux de tendance parisianiste (Racing Club de France) avancé. Peut être à raison, peut être à tort. Personnellement j’ai eu à pâtir de son alliance avec Georges Frêche (belle paire de césars!) pour «éradiquer» le MUC, illicitement. Je ne lui en veux pas vraiment ne serait-ce que parce qu’il avait mérité son surnom de «Bébert la godasse» quand il jouait au SUA. Rendons donc un dernier hommage appuyé à ce dinosaure du rugby mondial.bebert.jpg


Dinosaure d’abord quant à l’allure d’ancien seconde ligne old fashion, dévoreur de foie gras et de ris de veau sauce financière, amateur de whiskies, défi vivant au cholestérol, joueur de belote addict… Cet homme de presque quatre vingt quinze ans, avait inauguré le qualificatif de «gros pardessus», à cause des lourds vêtements dont s’emmitouflaient les hauts dirigeant du rugby de cette époque. Il était passé du béret à la casquette scottish vintage sans renier ses origines gasconnes. Il se référait à cet avis de Denis Tillinac «Je concède aux Flamands ou aux Lorrains le droit de jouer au rugby; on s'y risque même en Allemagne. Je préfère voir valser les "gonfles" là où elles poussent toutes seules, autour des bastides ocre et rose. Question d'harmonie. (Rugby Blues p. 43)». Le cigare gros calibre vissé aux lèvres tirées d’un sourire permanent qui masquait des colères volcaniques, il incarnait l’image expressive de ce que l’on traite aujourd’hui ironiquement de «rugby cassoulet». Le rugby dont la troisième mi temps était partie incontournable et faisaient légendes. Au point, parfois, de se retrouver dans le canal* ! Un sport civilisateur comme disait l’ethnologue. Une race en voie d’extinction, comme les dinosaures. Sauf qu’il s’agissait d’un rugby amateur parfois jusqu’à l’excès (les mutations «bénéficiaient» de licences rouges), d’un sport humaniste qui imposait les joueurs de couleurs (Bourgarel, Blanco) aux sudafs pratiquant encore l’apartheid, qui les menaçait de boycott pour leur pratique surannée. Un président capable de créer des instances d’assistance pour les blessés ou nécessiteux de l’ovale. Un président qui, un jour fit un don financier astronomique (il ne désirait pas qu’on en communique le montant) au club d’Agen, sur ses propres deniers. Un président orphelin d’enfant mais qui s’en trouvait dans les équipes de France. Fouroux, notamment, qui fut son préféré et son meilleur ennemi après sa «trahison». Car l’homme ne supportait pas qu’on «le manque» comme il disait. Il resta fâché dix ans avec son ami-partenaire Guy Basquet pour un obscur prétexte. Il se fâcha aussi avec les «rosbifs» pour leur montrer que les français n’étaient pas que des «faire valoir» d’oxfordiens soit disant flair play !

Avec Bébert se ferme un chapitre de l’histoire du ballon ovale. Peut être même s’agit-il de la fin de cette histoire. Un autre livre contera les péripéties d’un spectacle sponsorisé, médiatisé, body buildé. Nourri d’adjuvants de forme. A l’époque de Ferrasse on prenait ces choses à la rigolade. Amédée Doménech (le Duc) s’esclaffait «Le doping ? Vous plaisantez mon bon monsieur! Je n'y toucherai jamais. C'est comme une maîtresse, après, on ne peut plus s'en passer…». Gustou suçait du Guronsan en guise d’amphétamines. Aujourd’hui, hasard du calendrier, on écarte un joueur de l’équipe nationale au prétexte… qu’il est trop naïf**.  De Villiers invoque des usages festifs, Goze parle de «cas isolés», Camou «de problèmes administratifs et non de substance». Avec des accents de Tour de France. J’exagère ? Bof, à peine ! Rappelez-vous, à l’époque, Malléjac et Charly Gaul ne parlaient que de dopette sans grandes conséquences. Puis il y eut des morts… Les cadences infernales, les chocs de plus en plus violents, l’exigence de performances, c’est cela mon bon monsieur qui fait l’actualité du rugby. Nous allons vérifier lors de la Coupe du Monde (inventée par Bébert !) cette dérive inéluctable. Pour moi, le rugby idéal serait: le physique polynésien (sans les tatouages), l'éducation britannique, les fondamentaux appris à l'école, une formation protégée des prédateurs, une musculature forgée aux travaux des champs, un calendrier qui permet la récupération, des matches où il est d'abord question de jeu et de victoires... des troisièmes mi temps festives et solidaires où Gargantua s’invite.

Le rugby de Tonton Ferrasse quoi !


* Ferrasse avait basculé en voiture dans le canal latéral à Agen, un soir de 2004
** Huget « défausse infantile » d’un problème plus profond ?