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25/09/2019

LA PETITE ÉCHOPPE

Vous devriez regarder Arte!
Je sais, c'est un peu hard, je vous l'accorde, quand, sur d'autres chaines, se bousculent les séries plus accrocheuses les unes que les autres. Néanmoins, en regardant "Un si grand soleil", vous avez raté "Ces financiers qui dirigent le monde : BlackRock". Tout se trouve dans le titre! En d'autres termes, ce n'est pas Trump, Poutine, Xi Jinping, encore moins Macron, Ursula von der Leyen,… pas moins les grandes banques internationales, ni les fameux GAFA… qui donnent en dernière instance les directions à suivre aux acteurs de la planète, mais un gestionnaire de fortune qui fait fructifier l'argent des autres. Blackrock! Pourtant les médias grand public nous entretiennent avec les images iconiques de "grands" de ce temps même si certaines sont renversées (Cf Macron).
Comme il faut bien que je vous donne la mesure de la chose, Laurence Douglas Fink dit Larry Fink, patron de cette échoppe gère 4.900 milliards de dollars, est actionnaire de la Deutsche Bank, de BASF, Siemens, Apple, Microsoft, McDonald’s, Allianz, BMW, Daimler AG, Intel, HSBC Holdings, British American Tobacco (BAT), Vodafone, ainsi que des trois plus grandes Banques des États-Unis, et, en France de quasiment la moitié des sociétés du CAC40, comme AXA, Sanofi, Safran, la Société Générale, BNP Paribas, Schneider Electric, Michelin, Vivendi, Accor Hôtels ou Lafarge Holcim. Voilà pour le poids financier. De plus le fameux Lary (ou ses sbires) a servi d'évaluateur des actifs "pourris" du Trésor et de la Federal Reserve U.S., des comptes de la Grèce et de l'Irlande…
Leader des fonds de placement, Blackrock s'impose aussi en maître des ETF (exchange traded funds) (fonds indiciels cotés) qui sont des produits construits sur les indices boursiers. À travers sa société iShares, elle détient 39% de ce marché avec une fortune de 803 milliards.
Résultat de cette "caisse" gigantesque, tout le monde appelle Blackrock à l'aide lorsqu'un organisme important flagelle. Big B. dégaine alors son outil d'audit appelé Alladin, sorte de pieuvre informatique monstrueuse (6.000 serveurs de calculs interconnectés!), pour délivrer le verdict… et, le cas échéant, récupérer via des participations indirectes, des morceaux de choix.
Bon, vous allez dire, ce n'est déjà pas si mal comme échoppe! Attendez la suite: les deux marchés qui vont rapporter demain de gros sous sont l'I.A. (Intelligence Artificielle) et les terres agricoles (on parle de taux de retour sur investissement entre 40 et 120%). Blackrock s'est positionné en pole position sur les deux avenirs juteux…
Voilà ce que vous auriez pu retenir de votre escapade sur Arte! Et vous vous seriez rappelé le petit français qui se revendiquait "ennemi de la finance", dressé et vindicatif, sur la place de Tulle!

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Voilà pour le premier volet du tableau. Le second, découle de la mode actuelle des politiques économiques des grands pays consistant à arroser de liquidités. Cette injection massive de monnaie (270 milliards cette semaine*, et encore 53 milliards d'$ en continu par la FED**) s'avère simplement un "artifice" que les banques centrales ou les gouvernements souhaitent utiliser dans l'espoir de stimuler l’activité sans réformer. Activité qui, pourtant, ne décolle toujours pas! Ou bien c'est  aussi une façon de colmater des "gap spéculatifs" (comme récemment sur le pétrole). Qui profite donc, en premier, de toutes ces liquidités? En premier les riches qui peuvent spéculer via les "produits" offerts par Blackrock. En second Blackrock elle-même via ces mêmes produits.
Je ne voudrais pas vous casser le moral mais faisons un peu de science fiction… française. Quels sont les grands dossiers que le gouvernement macronien va traiter à la rentrée? La réforme de la retraite, le Brexit et le soutien à l'agriculture.
A l'affût des retraites: un groupe d'assurances comme AXA. Qui détient 6% du capital d'AXA? C'est trop facile: Blackrock. Le Brexit s'annonce comme une rupture annoncée avec la GB. Qui a renforcé fortement sa position dans le Groupe Eurotunnel? Trop facile… L'agriculture française se meurt. Qui rachète les terres fertiles?... Vous avez gagné!
On peut m'accuser de complotiste. Mais ces prises de positions me paraissent largement prémonitoires de récupération des bons fruits tombés de l'arbre secoué par Emmanuel Macron. En prétextant des problèmes d'équilibre budgétaire devenus fantasmagoriques à un moment où la France emprunte à taux négatif! Tout bon gestionnaire (même si l'assimilation du budget de l'État et de l'entreprise reste une aberration) sait que dans ces conditions l'effet de levier*** devrait inciter à s'endetter un max! Cequi importe reste le BON USAGE de l'argent emprunté (apte à générer un retour positif) ce qui implique des choix pertinents.
Hélas ces choses sont peu lisibles pour la plupart des citoyens qui croient, contraints et forcés, que la politique économique se décide à Bercy, voire à Bruxelles.
 
Au dessus de tout ces dysfonctionnements monétaires plane l'ombre de Keynes que les monétaristes avaient enterré. Les "chicago boys"**** se gaussaient des derniers keynésiens. Or, ce qui se produit est très fidèlement décrit dans la théorie keynésienne et s'appelle "la trappe à liquidité". Soit en termes très simples, il arrive un moment, lorsque le taux d'intérêt baisse, où l'injection monétaire ne déclenche plus de reprise économique mais se perd dans les méandres de la spéculation. Tout ce que je viens de décrire en tombereaux de monnaie déversés par la FED et la BCE incarne parfaitement et fidèlement la trappe à liquidités.
Lorsque les "chicago bad boy's" auront fini de s'entêter viendra le temps de l'hélicoptère dont j'ai parlé il y a quelques notes (Le reboussie. 05/12/2017 Le coup de l'hélicoptère). Cette solution "extrême" survient lorsque les mécanismes de relance monétaire ne fonctionnent plus et qu'il faut donner directement de l'argent aux acteurs finaux afin qu'il ne se disperse plus dans ladite trappe.
Dans une autre époque ce que nous venons d'évoquer (désaisissement du pouvoir des gouvernements) s'avérait moins grave puisqu'au bout il y avait le progrès largo sensus... (et certes quelques nuisances). Les GAFA n'avaient pas encore laminé toute la législation anticoncurrentielle. Aujourd'hui cela s'avère gravissime car tous les scientifiques sérieux anticipent des catastrophes si les dinosaures de la gouvernance financière continuent ceteris paribus sur leur erre. Mais je l'ai déjà dit: les monstres financiers qui existent et constituent cette gouvernance accepteront-ils d'infléchir leur course au profit? Joseph Stiglitz le pense (le Monde du 25/09).
Mais rien n'est moins sûr!
 
* la Federal Reserve Bank est la banque centrale des États-Unis
** pour donner un ordre d'idée le PIB de la France est de 2500 milliards
*** L’effet de levier désigne l’utilisation de l’endettement pour augmenter la capacité d’investissement d’une entreprise, d’un organisme financier ou d’un particulier et l’impact de cette utilisation sur la rentabilité des capitaux propres investis. L’effet de levier augmente la rentabilité des capitaux propres tant que le coût de l’endettement est inférieur à l’augmentation des bénéfices obtenus grâce à l’endettement  https://www.lafinancepourtous.com/
****  on appelle ainsi les tenants de l'école de Chicago dont le leader est Milton Friedman pape du néo libéralisme à l'origine du courant monétariste

05/09/2019

AH! LA VÉRITÉ!

235612_image.jpgAh, la vérité! Les dirigeants nous assènent en continu ce qui est vrai et doit être suivi, et ce qui est faux et doit être condamné. Comme si ces gens détenaient la vérité pure et dure. Qu'ils constituaient le "camp du Bien". Les religieux (prêtres ou prosélytes) faisaient œuvre de détenteurs majeurs de ce produit "En vérité, je vous le dit…". Puis les politiques s'y sont mis, puis les professeurs-experts, puis tout le monde… Ce faisant on généralise le principe d'exclusion: celui qui n'est pas de ma religion, de mon pays, de mon parti, de mon avis,… est un imbécile condamnable. Les clans se forment autour de ces croyances transformées en vérité, et les clans s'affrontent pour faire taire ce qu'ils considèrent l'anti-vérité., Allant parfois jusqu'au LBD, voire la kalachnikov en guise d'arguments ! Et les quidams s'y sont mis! Puisant dans des réseaux sociaux qui pensent à leur goût, fustigeant les autres avis, d'où qu'ils viennent, ils s'enferment dans des micro mondes sectaires, incapables de la moindre concession, fut-elle créative. Le débat, s'il existe, est gouverné par une logique d’exclusion qui repose elle-même sur la disqualification de celui qui pourrait vous contredire.
 
Ces derniers jours, dans l'émission Rembob'INA, où Anne Sinclair interrogeait P. Mendes France, on pouvait entendre un homme qui faisait l'inverse, c'est-à-dire expliquait modestement les décisions prises, les circonstanciait, justement pour leur ôter ce parfum vénéneux de vérité implacable. Mendes a inventé "le parler vrai" repris ensuite par Michel Rocard. Parler vrai, ne consiste pas à asséner des Vérités qui n'en sont pas, mais tenter de ne pas travestir la réalité en l'analysant. La même Anne Sinclair disait en parlant de ce dernier: "Il chérissait la vérité, même si elle était à contre-courant, il vénérait la franchise, même quand elle coûtait cher, il  pensait sans biaiser, il a eu souvent raison. Il fut peut-être le dernier de cette lignée". Voilà sans doute un bon résumé de l'affaire!
Pierre Bourdieu, lui, disait "Il est infiniment plus facile de prendre position pour ou contre une idée, une valeur, une personne, une institution ou une situation, que d'analyser ce qu'elle est en vérité, dans tout sa complexité.".
Cela m'a frappé notamment au moment où on voyait un Macron s'affronter avec un Bolsonaro en assénant des arguments qui ne pouvaient satisfaire que leurs affidés, arguments portant sur un problème pourtant majeur: la forêt amazonienne.
Prendre position contre Bolsonaro (même si ce n'est pas la fleur de la politique internationale) en tant que seul responsable-brûleur de la jungle, ce qui représente un début de vérité, devient un mensonge si l'on ne relativise pas avec qui, quoi, comment, pourquoi! Soit toute la complexité de la chose.
Affirmer aussi que seul le néo-libéralisme recouvre une vérité, conduit à un mensonge. En effet pourquoi l'inflation reste atone alors que l'on a déversé des milliards de liquidité après la crise de 2008? Les taux d'intérêt sont au plus bas, pourquoi les ménages épargnent-ils encore?... Dis Friedman pourquoi tu tousses? En fait, il n'y a pas de vérité intangible en économie. En économie, le parler vrai c'est, disait Raymond Barre, "Dans ce domaine, il n'existe pas une bonne décision et une mauvaise. Il y a une décision à laquelle une majorité d'individus croient et qui va réussir, et une qui, théoriquement est parfaite, mais à laquelle personne ne croit et qui va échouer".
Nous évoluons à la fois dans une culture-vérité qui est la volonté de remplacer les différentes opinions par une opinion unique que l'on a choisie comme la référence. C'est un intégrisme, c’est-à-dire refus de la diversité, et par définition, de l'Autre.  Et, en même temps, on assiste à une fabrication massive et consciente de fausses vérités (Fake News) qui brouillent en permanence la lecture et l'analyse du Monde. Bernard Stiegler avance la thèse intéressante comme quoi la Vérité serait un horizon certes inatteignable, mais qu'il serait crucial de toujours chercher à atteindre. L'enjeu ne serait plus de croire en elle, mais juste d'essayer de s'en rapprocher par les chemins du langage, du débat et de l'honnêteté intellectuelle, autant raisonnés que poétiques. Sous ce prisme, les fake news pourraient être perçues comme les révélateurs d'une information subjective par essence, dont il conviendrait de douter de la véracité avant de s'en nourrir ou non. Et apparaître ainsi comme des vaccins contre l'impérialisme de la vérité révélée.
Dès maintenant, considérez toute affirmation comme potentiellement fausse, cela vous fera avancer vers un début de vérité!