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14/04/2007

Y A BON BANANIA!

PRINTEMPS 2007.
MAN (ce sont ses initiales) s’apprête à pénétrer dans la préfecture. Il fait la queue depuis six heures, il n’a pas chaud dans son costume marron, mais il est guilleret. Après onze ans de présence montpelliéraine qui lui ont permis d’acquérir successivement un diplôme d’université en informatique, un DEA de GRH et une thèse de Sciences de Gestion, puis d’exercer pendant deux ans comme ATER à l’Université, il n’a toujours pas de carte de séjour permanente. En effet il est nigérien, et … gentil. Mais aujourd’hui il est joyeux car il apporte un contrat de travail en bonne et due forme comme il le lui était exigé. Contrat écrit sur papier à entête et signé par les parties, le recrutant comme chargé d’études dans une association de recherche cinquantenaire pour laquelle il s’occupera du suivi matériel de la revue.
Vers dix heures et demie, arrivé devant dame préposée qu’il connaît pour effectuer son « suivi », madame Pâté, MAN exhibe son contrat, passeport espéré pour sa tranquillité. « Bonjour, madame Rillette, euh, … râté ! Voilà le contrat ». « Comment, dit le cerbère vindicatif, une association ? N’importe qui peut m’amener « ça » ! ». « Mais , … madame … je vous assure c’est parfaitement clean … ». « Allez, reprenez votre papier, n’insistez-pas ! Il y a du monde qui attend !! Au suivant !!! »
Cette dame, fonctionnaire contractuelle irascible a réussi, en cinq minutes, à humilier un gentil savant (du moins comparé à son niveau à elle), à mépriser une association fondée cinquante ans au paravant et à laquelle ont appartenu, entre autres, des personnalités de premier rang, bafoué la signature du président actuel, non moins respectable. Dans sa tête, elle se dit chaque fois qu’elle voit MAN, « Si on lui met une chéchia, il a la tronche de Banania ! Si c’est pas une honte ! Il y a combien de blancs qui voudraient travailler à la fac ! ».
Ce matin, MAN a replié piteusement son contrat avec des gestes un peu désordonnés, … et murmuré deux ou trois mots dans une langue ésotérique. Il est reparti à sa galère ulcéré.
Toutefois, il est fort possible (si la dame connaissait la langue de MAN, son nom l’indique) que le gentil garçon appartienne à une des familles majeures des marabouts haoussa du haut Niger. Qu’il n’en use pas d’ordinaire. Mais que là, excédé de deux ans de tracasseries administratives, il ait un peu « travaillé » l’avenir de la dame !

PRINTEMPS 2010.
Madame Pâté se ronge dans la salle d’attente de la société Krueger,entreprise australienne implantée à Grabels. C’est sa dernière chance ! En août 2007, son mari l’a quitté pour sa voisine. Comme ils n’avaient pas d’enfants et que la villa venait des parents de l’époux volage, elle s’est retrouvée à la rue. Un mois après, son contrat n’a pas été renouvelé par la préfecture, Sarko tenant ses promesses en allégeant le poids de l’Etat … par le bas ! Tous ces tracas lui ont déclenché une polyarthrite rhumatoïde qui la fait beaucoup souffrir.
Mais là, elle y croit ! Elles ne sont plus que deux candidates pour ce poste et le grand directeur des ressources humaines les reçoit ce matin pour trancher.
On appelle madame Pâté et on l’introduit dans un grand bureau design. « Bonjjj … ». Elle titube : là, derrière le bureau, MAN sanglé dans un costume gris mohair et soie, qui l’accueille avec un grand sourire. « Bonjour, madame. Madame Frincandeau, si je me souviens ! Remettez-vous ! ». Elle s’enfonce dans un fauteuil trop mou, tandis que le directeur des ressources humaines en ouvrant un dossier rose murmure « Y en a pas bon Banania ! » ……

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