18/06/2010
LA SOUPE ÉLECTORALISTE
Je ne vous parlerai pas vraiment des retraites, ni de foot, ni de turpitudes de secrétaires d’État.
On se trouve dans une période délétère, sans autocensure face à la connerie banale. Tout le monde dit n’importe quoi, en fait autant, sans réfléchir aux conséquences. Et en plus, on nous parle de rigueur ! Rigueur à droite, rigueur à gauche (pas pour les mêmes), rigueur au centre qui se cherche, … Et, pour argument ultime, on nous dit que l’on ne pourrait pas faire autrement, que c’est ECONOMIQUEMENT IMPOSSIBLE de faire autrement!
Un de mes vieux profs disait souvent «Quand vous entendez dire qu’économiquement il n’y a pas d’autre issue, sachez que vous vous trouvez face à une imposture. L’économie c’est la science des choix, pas de la voie unique !». Le diagramme d’indifférence est enseigné dans les deux ou trois premiers cours de cette discipline ; Il dit que selon un pays et une dotation en facteurs de production donnés, toutes les combinaisons de fabriquer du pain ou des tracteurs, sont économiquement indifférentes. Le choix final s’avère «extra économique». Un autre prof, plus moderne, nous expliquait que la réalité était un puzzle gigantesque dans lequel le Politique (remarquez la majuscule) choisit de nous montrer une partie qu’il a définie comme pertinente afin de gérer le présent et l’avenir selon ce « panorama ». Un Politique différent aurait tout aussi bien pu privilégier un autre bout du puzzle pour établir sa gestion. Le citoyen électeur choisit donc entre des morceaux de puzzle. Un dernier enseignant, aux penchants culinaires, prenait l’exemple des soupes. Un problème de politique économique, disait-il s’avère semblable à une soupe. Le cuistot gouvernant a choisi les ingrédients, les adjuvants, les épices, le récipient, le temps de cuisson, la façon de présenter, de servir, de consommer,… et puis il nous explique que selon, la garbure, l’ouillade, la potée, le minestrone, le gaspacho, le mijet, la bouillabaisse, le miette, la chorba, la soupine … représente la seule version défendable du plat de référence. En fait, il existe une «préférence locale idéologique» qui fait la bonne soupe… locale !
Tout cela pour proclamer que j’en ai marre des pontifiants, pseudo économistes bidons mais surtout politiciens péteux, qui passent leur temps (d’antenne) à discourir sur l’hérésie du ceci ou cela, comme des experts incontestables. La soupe des retraites va donner lieu à une série de recettes dites économiquement équitables ou ineptes selon untel ou untel. Tant que je n’entendrais pas dire, en préambule, «Politiquement j’ai choisi de privilégier …», je zapperai. Parce qu’il s’agit de cela et de rien d’autre ! Au lieu de ce parler vrai, chacun pue le calcul électoral ! Qui osera me dire que le gouvernement ne gère pas son fonds de commerce de voix ? Que Martine ne parle pas à son «marché politique» ? Que Valls ne tente pas d’accrocher une part de marché centriste ?... Victor Hugo parlait de ces procédés falsificateurs des petits maîtres qui vivent de la soumission trop soudaine des peuples. Faire de la Politique pour un dessein humaniste enfin et en assumer les dangers, voilà ce à quoi j’aspire. « Rénover l’espace politique démocratique passera nécessairement par la confrontation avec le dire vrai : une politique adulte ne peut manquer à l’avenir d’être également une épistémologie du courage » (Cynthia FLEURY. La fin du courage. Fayard).
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