21/12/2010
STRATÉGIE...STRATÉGIQUE
Au point où nous en sommes, l’élection présidentielle mérite une petite analyse « décalée ». Décalée, cela veut dire qui élimine tout a priori, tout blocage circonstanciel, pour ne retenir que de la stratégie… stratégique ! La stratégie qui est un montage destiné à parvenir efficacement à une finalité voulue. Finalité d’intérêt général que je traduirai simplement pour ma part selon la devise, TSS, tout sauf Sarko et son cortège d’oligarches richissimes.
Mettons-nous en lieu et place du PS, au sens large toutes tendances confondues. A l’évidence, deux seules hypothèses tiennent la route : DSK s’avère candidat au dernier moment et il gagne sans coup férir face à tout autre candidat, ou bien aucun autre possible compétiteur ne fait le poids… gagnant sachant qu’en plus il subira la « malédiction » des non retenus dépités (Valls, Montebourg, Hollande,….) à l’instar du TSS (tout sauf Ségolène) de 2007. Voilà la vraie situation et ce n’est pas le concours de miss des primaires qui changera quelque chose à ce dilemme. En fait, la présidentielle au suffrage universel avec élimination au premier tour, représente un scrutin « antidémocratique » au sens ou il privilégie un homme (une femme) bien au delà d’un programme et d’un contenu idéologique. La gauche n’a eu qu’un gagnant, François Mitterand, parce que lui seul avait le profil (exit toute connotation socialisme, sociale, éthique,…) ad’hoc. Entre temps, elle s’est contentée de participation sans ambition (Defferre, Duclos, Hue, Buffet,…) ou d’ambitions sans suite (Jospin). En outre, l’erreur majeure de Lionel Jospin d’inverser le timing électif, fait que les législatives subissent le « théorème d'impossibilité d'Arrow » sur la révélation des préférences… dans le mauvais sens !
La lucidité porterait donc à jouer la stratégie suivante (hors hypothèse dsk) : Décider de ne présenter aucun candidat PS en enfourchant urbi et orbi l’aspect antidémocratique de ce « machin gaulliste » plus adapté à adouber les dictatures de pays en émergence qu’à la patrie de Rousseau, Montesquieu et Jaurès. Rappeler à l’envi la phrase « le peuple souverain, il est là » en désignant le Palais Bourbon. Utiliser le fameux « coup d’État permanent » dénoncé par Tonton, avant qu’il n’en fasse son quotidien !
L’ambition secrète serait de faire ainsi exploser la droite UMP en misant sur des législatives style « vague rose » impliquant une cohabitation fructueuse. En effet les français aiment la cohabitation. Et ils ont raison, puisque c’est à peu près le seul système de contrepouvoir viable dans cette Vème République.
Donc, disais-je, aucun candidat étiqueté ou labélisé socialo. L’espace, le gouffre, ainsi créé, incite la « droite bio » incluse dans l’UMP de s’approprier cette opportunité en poussant du coude Sarkozy qui commence à les lasser avec son oligarchie personnelle et son américanisme forcené. Cette droite bio se donne un candidat pertinent dans le registre style, par exemple, Bernard Debré, propre, de vieille filiation gaullienne, professeur de médecine et débatteur séduisant, capable de parler de la pauvreté sans mépris, du libéralisme avec circonspection, de l’atlantisme avec les pudeurs de papa. Et Nicolas, qui se croit indispensable, se replie alors sur ses lieutenants cata, Boutefeux, Lefevbre, Paillé, Besson… comme autant de freins à sa dynamique. Villepin, creux comme un bambou, agite son éloquence mais le français moyen n’adhère pas : c’est trop beau, trop sophistiqué, trop intello, trop pas assez !
Le centre se croit enfin libéré, mais n’a pas le temps matériel de construire une offre cohérente de type UDF giscardienne, et se scinde en mille morceaux. Borloo, Bayrou, Morin, voire Baylet et consort n’arrivent même pas à trouver un consensus sur le problème de la laïcité, ni une ataraxie d’obédiences. Tapie, qui s’en mêle, n’arrange pas les bidons !
Les verts, qui ont toujours rêvé de devenir le phare d’opposition, se lancent à fond dans une campagne d’exigences écologiques extrêmes, apte à effrayer même un piéton végétarien affilié à Nature et Vie. Le choix de Hulot, dicté par l’audience potentielle, sonne faux à la fois dans le champ politique et dans le monde quotidien encore peu motivé aux concessions à faire à la durabilité de la Planète.
L’espace élargi se présente aussi comme un certain handicap pour Marine moins crédible dans des propositions excédant le champ privilégié de son parti, c’est à dire dans une exigence de se dimensionner en hypothèses de gouvernement réel et non fantasmé. Elle s’était entrainée pour le tryptique « émigration, europe, mondialisation », moins pour la sécu, l’enseignement, le pouvoir d’achat, le ferroutage…. Néanmoins, son populisme structuré et ses arguments audibles par le quidam, l’apparent bon sens de son argumentaire, sont renforcés par la hargne sarkozyste qui tente de braconner sécuritairement sur cette aile droite.
À gauche, le Parti éponyme perd son punching ball préféré et doit se positionner autrement que contre, exercice dans lequel il excelle moins, Mélenchon compris. Le NPA n’a pas de consistance puisque les communistes sont enclins à présenter un candidat pour pouvoir exister en vue du partage relatif aux législatives (idem pour LO).
Verdict : 58% de votants, 44 d’expimés. Résultat : N. Sarkozy 19, B. Debré 32, M. Le Pen 23,06, N. Hulot 8, Parti de Gauche 10, PC 3,4, LO 0,8, Dupont Aignan 1,2 Centre (toutes tendances confondues) 5,18. Le second tour oppose donc BD à MLP et, quoique le stratagème « Sauvons la République » soit un peu éventé, le premier est élu avec près de 70 pour cent des suffrages. Exit Nicolas et son orchestre.
Les législatives qui suivent permettent à la gauche largement « associée » de faire un tabac et de s’installer légitimement dans le registre du pouvoir, tandis que la droite règle ses comptes internes sans pitié. Le PS s’est ainsi montré responsable et conforme à son idéologie. Il a coupé court à la valse « pour aller à la soupe » qui l’avait particulièrement affectée ces dernières années. Pour faire quoi ? Je ne saurais vous le dire, mais pour ma part, pire que Sarko ce n’est pas possible en matière d’équité et de solidarité en interne, de représentativité à l’extérieur.
Bien sûr ce scénario n’a aucune chance d’être même envisagé ! Les egos s’avèrent trop intéressés et pas grand monde (hormis Sarkozy) n’a vraiment analysé la nature profonde de ce scrutin. Dès lors chacun s’invente un destin national de sauveur, voire d’idéologue, ou une obligation d’affichage comme le petit artisan qui croit devoir participer au marché de Noël.
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