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18/04/2013

FIESTA MORTUAIRE

Les péripéties cahusaciennes ont largement occulté la disparition de Iron Maggie, la dame de fer, alias Margareth Thatcher. Et pourtant, il fallait voir les gens du peuple anglais sabler la bière, danser au milieu des rues, fêter dignement la disparition de l’ancienne dirigeante anglaise. D’autres, à la City, au champagne, se répandaient en regrets éternels, la main sur leur portefeuille. Les pires dictateurs sont ceux qui se font élire démocratiquement car cela leur confère la légitimité pour venir saccager tout ce qui a été patiemment bâti au fil des siècles et qui fait l’heimat* d’un pays.

Cette femme est sans aucun doute à la racine de la crise financière actuelle. Elle était d’un cynisme néo libéral total. Entre autre, elle a démantelé les syndicats anglais, éradiqué les derniers sites miniers, épuré le droit du travail des contraintes patronales, entrepris une vaste vague de privatisation, instauré la Poll Tax, un impôt par tête, défavorisant les familles nombreuses les plus pauvres, authentique retour au Moyen-âge… en même temps qu’elle dérégulait toute la finance et ouvrait la porte à la spéculation effrénée qui sévit depuis. Au passage elle avait accueilli dans sa demeure Pinochet et encensé son action, inspiré Reagan, mené une guerre inutile aux Malouines, "Laissé crever Bobby Sands", … Vis à vis du Marché Commun elle a, par ses exigences et la faiblesse de ses interlocuteurs, empêché les régulations correctrices des marchés et prôné la libéralisation financière. En résumé elle s’est comportée comme un vecteur essentiel de l’école de Chicago (Milton Friedmann et plus largement le groupe dit du Mont Pèlerin). Fermez le ban !Maggie.jpg

Margareth Thatcher était une anti keynésienne primaire, partisan du principe que pour que la classe aisée s’enrichisse plus, il faut que la classe pauvre s’accroisse et se paupérise. Les chiffres parlent : dans la Grande-Bretagne d'avant Thatcher, un PDG gagnait 10 fois plus qu'un ouvrier... En 2007, 100 fois plus.... Aux USA avant Reagan, un PDG gagnait 40 trois fois plus qu'un salarié moyen. En 2005, 400 fois plus... Cette idéologie qui séduit encore beaucoup de monde (il n’y a qu’à regarder la TV !) a conditionné la formation des élites de nos pays. C’est le programme dit des Chicago Boy’s destiné à formater les dirigeants des pays pro américains.

Résultat, le gâchis que l’Europe s’escrime à mettre en œuvre sous la houlette de dirigeants nourris aux recettes libérales, même s’ils ont le label socialiste. C’est pourtant simple. Je vous rappelle le « carré magique » de Kaldor : croissance, chômage, inflation, commerce extérieur. On ne sait tenir les quatre objectifs simultanément et il faut donc « lâcher » sur un ou plusieurs équilibres. En Europe on en est à faire l’impasse sur trois ! Alors pour en sortir, les libéraux proclament qu’il faut limiter la création monétaire (déficits) et rétablir les mécanismes incitatifs sur tous les marchés, ce qui passe notamment par la libéralisation du marché du travail et, en priorité, la chasse aux fonctionnaires qui vivent de la protection de l'emploi. Le remède n’a pas beaucoup évolué depuis Thatcher, Pinochet et Videla ! Et comme la potion est amère, il faut la faire passer, le cas échéant, par la force. Ces gens ont oublié que l’économie s’insérait dans une société !

Pour revenir à des choses plus lucides, rappelons Keynes qui disait que l’établissement du vivre ensemble s’avérait plus fondamental que le plein emploi. Et à Joan Robinson qui, critiquant les « Cambridgiens », mettait l’accent sur la répartition des revenus comme ultime régulateur des équilibres. Et retournons à Nicholas Kaldor préconisant une protection des entreprises nationales aussi bien dans l’enfance, que lors de la vieillesse. C’est pour lui un moyen de prévenir une rapide chute des profits de l’entreprise concernée, et ainsi de ne pas laisser aux concurrents étrangers, le loisir d’envahir le marché visé.

Dans cette ambiance délétère, la stratégie d’Hollande (en a-t-il vraiment une ?) consiste semble-t-il – maintenant qu’il a abdiqué sur les réformes de fond - à se fondre dans la barque européenne en espérant qu’elle passera (assez vite !) les rapides de la crise. On fait donc du libéralisme allemand en tentant d’expliquer que c’est du socialisme made in France. Et, de temps à autre, on élève la voix et on fronce les sourcils en fustigeant, pèle mêle, les menteurs, les exilés fiscaux, les paradis également fiscaux, les riches,.. Simultanément on agite des problèmes susceptibles de mobiliser des groupes sociaux en des détournant du champ économique. C’est mince ? Certes, mais comme ces « élites » ont été formatées, je l’ai dit, à la théorie économique dominante, ça leur semble le seul chemin (ornière ?) viable.

Alors quid de l’avenir ? A court terme, rien d’autre à l’horizon, puisque le choc des idées hollandaises est épuisé. Puisque la formoisie** roule en 4x4 et croit dur comme fer que c’est les postiers et les arabes qui ruinent la France. Rien en attendant les prochaines échéances électorales avec tous les risques potentiels. A moyen terme, comme je ne crois pas à l’arrivée de dirigeants à idéologie différente du fait de la puissance de la ploutocratie ambiante, il faut parier sur le fait que la Chine*** aura besoin de nous maintenir à un niveau de vie suffisant pour écouler sa production. Elle mettra donc en place une sorte de plan Marshall new look qui affectera notre dignité, mais facilitera un demi siècle de survie.

Après… à long terme, nous serons tous morts comme disait Lord Keynes.

 

* Heimat, concept d’origine allemande qui signifie « appartenance » selon l’idée d’une communauté  soudée autour d’une gouvernance locale.

** Formoisie (classe formoise): Classe sociale formée des travailleurs qui, par leurs diplômes (ou leurs connaissances validées socialement), obtiennent un revenu consommable plus grand que le revenu consommable moyen.  Elle se situe au dessus du Formariat , classe sociale formée des travailleurs qui, par leurs absence de diplômes (ou leur faible niveau de connaissances) ont une activité et une productivité faible. Ils sont exploités par les trois bourgeoisies: capitalistes, innovoisie, formoisie. Il s’agit de concepts néo-marxistes.

*** voire l’Inde

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