compteurs visiteurs gratuits

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

06/04/2009

ON EN A TONDU POUR MOINS QUE ÇA !

Commençons par le système dit de la vache corse : Dix vaches vraies et deux versants de colline. Vous en créez dix autres « shadow vaches » que vous dites se situer toujours de l'autre côté de la colline (vaches-miroir en quelque sorte). Vous obtenez factorielle dix (3.628.800) possibilités d'optimiser votre cheptel par rapport aux aides de Bruxelles, par rapport aux critères de mobilisation des prêts du C-A, à l'assurance, ... Lorsqu'on le désire, toutes les vaches sont saines, ou malades, ou laitières, ou mi-l'un, mi-l'autre, ... Si vous ajoutez à cela un veau pour chaque vache .... Vous pouvez vous amuser à calculer le potentiel mathématique de combinaisons (au propre et au figuré !) dont vous disposez. Et le pinzutto croit pouvoir moraliser ce système !
Remplacez vache par titre financier, colline par paradis fiscal et Corse par Monde ... et laissez aller votre imagination ! Vous ne rêvez pas ! Pendant plus de quinze ans des messieurs en costumes shantung et cravate de soie ont déliré sur cette base, s'adjoignant des super matheux avec hyper ordinateurs, afin de maîtriser les multifactorielles et autres complexités qui contribuent à noyer le client, le contrôleur, l'évaluateur, le fisc et tous les concurrents dans un tourbillon spectaculaire. En se reversant des sommes d'autant plus folles qu'elles n'ont (apparemment) rien coûté, si ce n'est de l'imagination, de l'astuce, de l'estomac et de la façade (il en faut pour que le système se perpétue).  
La chose n'est pas neuve. Robert Law, le génial banquier écossais du Régent, représente l'archétype de l'arnaque brillante (1716-1720) et peut endosser la paternité spirituelle de Madoff. Toutefois, eux ont assumé, sous leur nom, leurs agissements, et ils me sont plus sympathiques que les traders anonymes qui se sont gavés en utilisant le fric des autres ... et qui roulent toujours carrosse (pardon Lamborghini !). On a chassé Law jusqu'à sa mort et Madoff crèvera dans les geôles américaines. Les vampires anonymes ne sont pas inquiétés. Mieux, on leur redonne sans coup férir des cartouches pour recommencer, avec une feuille de vertu à tenter de respecter ... sinon ... !
Cette impunité gangrène tous les plans de relance. Plus personne ne fait confiance à personne, et surtout pas les loups qui savent que les autres loups restent à leur place ... pour refourguer les toxiques qui plombent encore leur portefeuille et relancer des montages « trompe-couillons » merveilleux !
On a tondu des gens pour moins que ça !
Pourtant nous vivons une époque à peu près semblable à la Libération. On se réveille avec des ruines, des morts, des blessés, des collabos, des miliciens, des héros, des justes, des gros profiteurs (parachutages, détournements), des petits profiteurs (marché noir), des tout petits profiteurs (jambon-œufs-beurre), des dénoncées, des juifs, des tziganes, des communistes, ... Il faut trouver quelques boucs émissaires pour leur faire endosser « l'épuration » des esprits, générer quelques sauveurs pour rallier la masse dans une marche vers l'avenir, choisir qui, en fin de compte, va gagner, et qui, dès lors, va perdre. Dure période où le courage n'est pas la meilleure part ! Où la plupart craint un peu pour son passé, son présent ou son avenir.
Ainsi le capitalisme, face à ses turpitudes, se cherche un (des) bouc(s) émissaire(s) sur lesquel(s) le bon peuple pourra passer son ire et le(s) sacrifier sur l'autel de la continuité retrouvée. C'est l'apophthegme de René Girard qui nous enseigne que lorsque la société aborde un moment de violence paroxysmique mettant en jeu son intégrité, elle se « défausse » via la procédure de la victime émissaire laquelle, chargée de tous les péchés du monde, expie les errements précédents pour permettre de retrouver un état « normal ». Aujourd'hui, on désigne les responsables potentiels, on leur jette opprobre, mais de bourreau point ! Personne pour porter l'épée sacrificielle dans leur flanc. Il est dit, il est demandé, il faut, il faudrait, ... mais, à mon avis, ce ne sera pas suffisant. Hier (1929) les banquiers honteux se défenestraient. Aujourd'hui, il faudrait aussi « du sang » et non pas des larmes de crocodiles ! La pleureuse Parisot, parée de ses robes de deuil rose, tirant sur des suaires d'or découvrant à peine les portefeuilles ventrus, ne peut satisfaire la foule hurlante des revendiqueurs. Et comme ce fut une guerre mondiale, les puissants se sont réunis dans une sorte de Yalta vingtenaire. Pas de procès, Riom ou Nuremberg, mais des imprécations, des anathèmes, des exécrations, des abjurations, en réponse à la lancinante question : Peut-on réparer le capitalisme ?
De quoi parle-t-on ? La réponse s'avère plurielle ...
D'abord certains, en posant le problème, espèrent apporter des rustines pour, en fait, ne rien changer . On range dans cette catégorie les pourfendeurs de paradis fiscaux et les apaiseurs du système financier, les injecteurs de fric massivement. Un peu de pommade de perlimpinpin aux yeux des gogos et à nous les profits, bonus et autres friandises, ... comme avant ! Toujours par rapport à la Libération c'est l'option Pleven plutôt que Mendes. Mendes France voulait moraliser en démonétisant afin de repérer les fraudeurs et les sanctionner.  Pleven privilégiait la fuite en avant et devant les responsabilités !  Qui pensez-vous qui gagna ? Les mêmes qu'aujourd'hui !
Le second groupe de « mécaniciens » du capitalisme voudraient « moraliser » le système. Définir un code éthique auquel se plieraient, volontaires ou obligés, les acteurs capitalistes. Mais qué za co moraliser ? Le moteur du système s'appelle profit, et le principe s'avère de le maximiser. Que reste-t-il à dire, sinon à transposer dans la sphère de la morale (politique ou religion) les limites humaines et sociales imposées, de l'extérieur, à l'économie capitaliste. « L'éthique protestante du capitalisme » Max Weber dixit, ou l'interdiction du prêt d'argent (catholicisme), voire la redistribution massive (social-démocratie), représentent autant d'avatars de ce courant moralisateur. L'efficacité de ces stratagèmes dépend de la prégnance de l'ordre prôné. La religiosité lutero-calviniste des E.U., la rigueur réformiste britannique ont longtemps borné le jeu des acteurs dans une aire « morale ». Idem pour les démocraties étatiques européennes selon des codes citoyens plus ou moins formels. Mais l'affaiblissement du poids des religions et l'effacement des États au profit de la mondialisation rendent le processus caduc. Reste le droit comme limitation de l'action économique jugée délictueuse. Mais le droit appelle une territorialisation et de s'applique que dans le cadre du détroit de coutume qu'il réglemente. Il n'existe pas, à ce jour, de loi internationale universelle en économie. C'est le piège de « Si tu es sévère, je me casse ailleurs ! ». Sur ce point précis, le passage à vingt des puissances invitées au sommet, s'avère une avancée certaine puisque les décisions qui y sont prises impactent un espace quasi exhaustif. Sauf que le bras armé qui accompagne consubstantiellement le droit reste bien flou. La tentative d'habiller le FMI en gendarme semble quelque peu désuète ... et connotée (on connaît les « gros quotas » !).
Un dernier groupe, plus à gauche en général, suggère de réguler le capitalisme. Les « régulationnistes » espèrent par le biais de mécanismes limitatifs ou correctifs faire fonctionner le capitalisme dans un chemin de croissance vertueux. J'ai passé ma jeunesse à épiloguer sur le chemin (Harrod-Domar et cie) et ma maturité à cerner la régulation (plan, marché, active, passive, feed back, ...). Ma conclusion consiste à dire que pour qu'il y ait régulation, il faut définir une limite précise au système, une finalité explicite en termes de contenu et d'horizon, un type de régulation. Au moins ! Or, aucune de ces conditions n'est vérifiée, à ce jour. Et, surtout, pas grand monde ne désire se plier aux contraintes d'un véritable système régulé, chacun craignant d'y perdre sa latitude.20.jpg
Alors, le « nouveau Monde » évoqué par Obama à l'issue de la conférence de Londres, me paraît ressembler comme un frère au précédent. Avec quelques gadgets pour amuser les spectateurs, avec quelques milliards pour intéresser les joueurs. Circulez et applaudissez bonnes gens ! « Quand un homme est broyé et qu'il se tait, c'est un individu normal. S'il proteste et réclame son droit, c'est un révolutionnaire ! » (René Char. Le Soleil des eaux)
Deux enjeux ont été soigneusement occultés : la répartition des richesses et les contraintes écologiques. Pourtant le Monde de demain découlera de là. En violence ou en ataraxie, c'est selon !

25/03/2009

L’ÉCUME, LE BOUILLON ET LE POT-AU-FEU.

L’état actuel de la crise, m’inspire cette parabole culinaire ! L’écume, c’est toutes les impuretés, les scories, qu’il faut enlever à l’écumoire. Et qui correspond aux actions toxiques (subprimes et autres sandwichs financiers vénéneux) que tous les états du Monde tentent d’éliminer. Mais, un peu comme Sisyphe, il en remonte en permanence et l’on évalue mal combien il en reste et quand cela s’arrêtera. Le bouillon, liquide nourrissant apprécié, illustre les liquidités « normales »[1] qui sont nécessaires pour irriguer l’économie réelle. Au fond, il reste le pot-au-feu (viandes et légumes), partie concrète qui représente cette économie réelle (usines, commerces, services, …). Ce pot-au-feu n’est pas forcément succulent ! Il peut s’avérer maigre et coriace, sec et filandreux, racorni même, ou moelleux et goûteux, c’est selon. Ainsi en est-il des économies sous développées, émergentes, dynamiques ou vieillissantes.

Le Président Sarkozy considère, implicitement, qu’en France, nous avons définitivement écumé les saletés remontant du fond des bilans bancaires. Position téméraire si l’on en croit les experts neutres, qui pensent qu’il en reste encore pas mal et que, de plus, les saletés enfouies dans les actifs des compagnies d’assurance vont les relayer (cf AIG aux E.U.). En effet il faut considérer que la crise tape de plus en plus et, chemin faisant, rend insolvables de nouveaux débiteurs. Premier impact, de nouveaux produits financiers basculent dans « l’écume » alors qu’ils n’y étaient pas encore. Second impact, leurs détenteurs se retournent vers les assureurs qui « couvraient » ces produits. Et ainsi de suite. Vous comprenez donc aisément que l’épuration de l’économie mondiale ne se conçoit pas comme un stock fini à éponger, mais comme un stock dynamique nourri par la crise. D’où le qualificatif de systémique pour dire que le phénomène s’auto-entretien.

Le président Sarkozy considère, naturellement, qu’avec le bouillon qu’il a rajouté dans le faitout France, la liquidité de l’économie redevient suffisante pour approvisionner tous les convives invités. Enfin, pas vraiment tous pareil ! Les puissants (les copains aussi) d’abord qui en ont pris des assiettes rases (Renault, Citroën, …). Les autres, artisans, PME, commerçants, doivent attendre patiemment de voir si l’écuelle qu’ils tendent comme la sébile du désespoir, sera honorée. Sans compter les « peu-éthiques » qui se goinfrent avec la louche à longue queue des parachutes et autres instruments de leur ménagère dorée.

Le président Sarkozy considère, explicitement (St Quentin), que l’économie réelle va repartir bientôt (Juin, Septembre ???). Certes, il y aura quelques morceaux incomestibles qui resteront au fond (les noms sont dans vos journaux quotidiens) mais, bon, c’est la faute à la crise ! Des oiseaux de mauvais augure (même de son propre camp) avancent qu’on aurait pu et du en profiter pour renouveler la viande (un peu obsolète) et les légumes (pas très bio) afin que le pot-au-feu redevienne un plat savoureux et donc compétitif, plutôt que de touiller les bagnoles à bout de souffle, au goût de Dacia ! Comme les morceaux sont de moins en moins nombreux, à la table du partage, certains n’auront pas accès, comme le disait si bien le révérend Malthus. Ceux-là s’appellent les chômeurs, mais aussi les artisans faillis, les commerçants ayant bilan déposé, … formant un cortège dense et revanchard. Pour l’instant ils demandent juste un peu de bouillon. Une cuillerée, SVP ! Peut-être que bientôt, la faim aidant, ils se jetteront sur le plat de côte et le jarret. Salauds de fonctionnaires, salauds de pauvres smicards, salauds de pauvres tout court, qui vous mangeraient votre profit ! C’est la crise, on vous dit, circulez et attendez que le capitalisme fut devenu plus éthique.Un jour où les poules auront des dents.

Sarkozy.jpg

A propos de gallinacé, il faut que je vous avoue quelque chose ! Chez nous, en France, la recette varie quelque peu ! Au pot-au-feu, on préfère la poule-au-pot. C’est à peu près pareil, avec des légumes, du bouillon, mais à la place du bœuf-veau comme les anglo-saxons, nous on met une poule. Cela tient mieux à la cuisson et il y a moins de scories à écumer. Certes, la recette ne date pas d’hier (Henry IV) mais ça marche(ait). En plus, pour le service, on assure(ait) une part à chacun, pas très grosse, mais garantie. On nous explique qu’il n’y a pas plus ringard, que seule la compétition est belle ! Avec un seul chaudron pour tous, africains, chinois, brésiliens, inuits … ça s’appelle la mondialisation. Dès lors, tous les sarkozistes dignes de ce nom, s’efforceront désormais de réformer notre plat pour qu’il devienne conforme au brouet global. Avec l’aide du chef trois étoiles au guide Continental : Laurence Parisot et le gâte-sauce Frédéric Lefevbre !

 

Dis, monsieur le président Sarkozy, tu ne veux pas nous laisser notre poule-au-pot ? Nous, on trouve que ça nous suffit, que le bouillon n’est pas trop gras mais que tout le monde (ou presque) y goûte. Que les morceaux sont petits mais nous sommes habitués au goût. Qu’il suffirait sans doute de se mettre au bio, à l’allégé et aux oméga3, raisonnablement, pour que les autres continuent de nous envier. Laisse-nous aussi notre petit coup de vin pour faire passer la chose, même si tu ne l’aimes pas. Et si Johnny veut encore se casser, tant pis pour lui, un philosophe de perdu, dix de gagnés!



[1] En fait on ne sait pas vraiment chiffrer cette normalité. Les dirigeants oscillent donc entre des postures laxistes (inflationnistes) ou restrictives (recessionnistes).

 

12/03/2009

LA DÉMOCRATIE DU LOBBYING

Souvent, l'habitude fait que nous ne remettons pas en cause des existants qui, pourtant, se sont considérablement modifiés. En plus, il est satisfaisant de croire à cette invariabilité lorsqu'il s'agit d'arcanes de notre société.
C'est le cas de la démocratie. La plupart des français  continuent à faire comme si la gouvernance restait le fait des élus tant au niveau national (A-N, sénat), que local (mairie, département, région). Pourtant, si on analyse en profondeur les choix publics, on s'aperçoit de l'impact fort (voire prioritaire) des lobbies*.
Qu'entend-on par lobbies ? On désigne sous ce terme des organismes qui, engagés dans la défense d'intérêts particuliers, cherchent à influencer les décisions ou monter des opérations. Cette action se fonde notamment sur la bonne connaissance des projets en cours d'élaboration dans les centres de décision législatifs ou réglementaires, dans des institutions nationales, régionales ou mondiales, et plus généralement sur des décideurs dont ils ambitionnent de modeler l'action au bénéfice soit d'une entreprise, d'un secteur d'activité**.
Ainsi, le quidam pense que le choix de supprimer la pub à la télé publique résulte d'une préoccupation politique de l'UMP, visant à «libérer» l'information du marchandising. En réalité les lobbies des opérateurs privés ont pesé fortement dans ce sens (au plus haut niveau), et les tensions dans ladite UMP en sont le révélateur. Combien de lois sortent à l'initiative du lobbying exercé par un secteur économique précis ? Combien d'autres restent lettre morte, faute des décrets d'application afférents « bloqués » par le même principe parce qu'elles «défrisent» des intérêts privés puissants (voir graisse hydrogénées, OGM, amalgames dentaires, ...) ?
Ce constat réel (et non polémique) s'avère fondamental puisqu'il tend à disqualifier le processus de vote démocratique en mercantilisant les choix publics. Quand les élus poussent pour le doublement de l'A9, est-ce par intérêt des usagers (à court et long terme) ou par chantage des groupes de BTP ? Quand les représentants de l'agro-alimentaire fait, à micro ouvert, la leçon au gouvernement pour que tel arrêté ne sorte pas (sinon ...) est-ce bien la démocratie qui s'exprime ? Quand la gestion de l'eau de l'agglo montpelliéraine tombe dans l'escarcelle de Veolia est-ce bien l'usager qui en tire profit ? Idem pour la privatisation des autoroutes et un million au moins de décisions plus ou moins récentes ! L'avantage (si on peut dire !) de Nicolas S. réside dans son relatif courage (ou cynisme) à ne pas masquer ces parti-pris d'intérêt en les travestissant en volonté libérale.
Qu'on ne se trompe pas, nous ne visons pas dans les lobbies les syndicats (salariés ou patronaux) tant qu'ils s'inscrivent dans le débat démocratique institutionnalisé ouvert (grève, manifestation, pétition) au même titre que les partis politiques. Ni même les associations lorsqu'elles s'érigent en contre-pouvoir d'atteinte à l'intérêt général. Mais on sent que la frontière reste fluctuante pour trier le bon grain de l'ivraie. Que chacune se revêtira des habits du bien commun, et même les plus «corruptionnelles» dérouleront des arguments ingénus.
dessin.jpgLe développement accéléré de l'influence politique des groupes sociaux organisés en lobbying est-il compatible avec les mécanismes traditionnels de la représentation politique, qui pourraient intégrer cette influence sans y perdre leur âme? Ou, au contraire, manifeste-t-il le dysfonctionnement pratique de la démocratie parlementaire et, en conséquence, l'obsolescence de ses grands arcanes: intérêt général, par opposition aux intérêts particuliers et, surtout, exercice de la souveraineté par les représentants élus ? Voilà un bon sujet de réflexion !
Comme le « discours sociétal » majoritaire se veut de moins en moins idéologique -et  les naïfs s'en flattent !- la citoyenneté se dilue dans une fragilité individuelle et collective vis-à-vis de ces pratiques. Dès lors, le quidam oscille entre deux pièges : croire les «grossièretés partisanes», ou subir l'effet lobbyiste. Dans la première posture jouent les ponsifs du type «le bio c'est un truc de gauchistes», «les instits sont des fainéants», «les anti OGM sont des rétrogrades»... Selon la seconde attitude, la crédulité devient de mise et gobe, au fil de l'eau, les discours lénifiants et la langue de bois. En miroir, les décideurs élus s'avèrent de plus en plus fragiles à ces « sirènes intéressées ». N'ayant plus le bouclier idéologique comme intime et ultime repoussoir aux pressions privées, et ayant, par contre, l'exemple «venant d'en haut» de telles pratiques clientélistes, les petits élus tombent de plus en plus fréquemment dans ces travers. Le gouvernement ne s'avère pas meilleur acteur puisqu'il semble jouer sur tous les tableaux, succombant lorsqu'il y trouve son intérêt (collectif ou privé), s'indignant lorsqu'il désire se débarrasser de lobbies gênants, se servant de prétexte pour fustiger l'immobilisme de telle ou telle association s'opposant à ses décisions «connotées». On observe, sans pouvoir la mesurer réellement, la «corruption» des mécanismes classiques de la représentation politique qui est (était ?) incarnée par la pureté de l'intérêt général et l'exercice souverain de la décision par les représentants du peuple. La réalité s'accommode d'une pseudo-démocratie au service d'un corporatisme exacerbé qui l'utilise en détournant ses fins. Ainsi, l'attribution des marchés publics et celle du financement des activités politiques, permettent d'évoquer dans quelle mesure les principes inhérents à la démocratie représentative sont viciés ou corrompus par des logiques d'intérêts économiques.
Cette (relative) aliénation «au marché» de la part des décideurs publics les empêche progressivement d'être porteurs d'une logique de d'intérêt public sitôt que cette dernière transgresserait des situations acquises. Donc d'être de moins en moins innovants et de plus en plus suiviste, plus du tout visionnaires comme l'ont été les porteurs de grands aménagements ou de grandes lois sociales.
Si l'on pose le rapport de forces, ce qui semble la moindre des choses en termes de pouvoir, nous observons que les lobbies s'exercent à tous les niveaux avec, évidemment, des outils très efficaces face aux « petits élus », mais aussi des stratégies sophistiquées pour les plus hauts niveaux (Etat, Europe, OMC, ...). Le système dit de «revolving door»*** n'est que l'une d'entre elles, la plus «visible». Il concerne les chassés-croisés qui existent entre le secteur privé et le gouvernement. D'une part, les hommes politiques gagnent énormément dans le secteur privé, mais comment se fait-il qu'ils se décident à entrer dans la politique où leur gain sera largement inférieur à celui qu'ils réalisaient au sein d'une grande entreprise ? Accéder aux plus hautes responsabilités de l'Etat va leur permettre d'établir d'importants contacts qui leur seront utiles lorsqu'ils retourneront au sein de multinationales.

En conclusion, votons-nous encore de nos jours, pour des hommes politiques porteurs d'un projet public ou pour des forces occultes de lobbies institutionnalisés ou non ? Les derniers empêcheurs en rond sont les fonctionnaires et les syndicalistes. Vous comprenez pourquoi ces gêneurs deviennent la cible privilégiée des snipers lobbyistes. CQFD

* La France n'a pas l'exclusivité des pratiques de corruption. Les États-Unis sont le berceau du lobbying et l’affaire Enron, a révélé combien elles sont choses courantes dans ce pays.

** Le commun des mortels hexagonal raisonne toujours en référence au lobby des bouilleurs  de cru !

*** pour ceux que cela intéresse, un panorama des rapports entre milieu politique et milieu des affaires aux USA se trouve dans le site http://dimension.ucsd.edu/CEIMSA-IN-EXILE/publications/Students/Revolving_Door_Meinier.pdf