10/10/2007
DEPOUSSIERER CAPITALISMES ET CLASSES SOCIALES.
Les occasions données à la réflexion idéologique ne sont pas légion ! Ainsi, l’autre soir, ai-je décidé d’assister à une réunion organisée par le quotidien « l’Hérault du jour » se posant la question fondamentale « Dans quelle société vivons-nous ? ». J’ai reconnu là les caciques du PCF montpelliérain et leurs épigones. Entre eux. Ce qui désespère de l’intérêt de nos contemporains à œuvrer pour « le bien public » largo sensu et pour contribuer à leur propre viatique culturel stricto sensu! Les interventions ont été de qualité, quoique prisonnières pour la plupart du paradigme marxiste orthodoxe.
Ces débats m’ont inspiré les éléments suivants :
1• Il faut dépoussiérer l’acception du concept de capitalisme. Les gens de gauche s’insurgent toujours contre « un capitalisme », bouc émissaire majeur, deus ex machina de tout ce qui va mal, diable incarné dans les « grands patrons ». Certes, il faut une cible, mais ne nous trompons pas en oubliant la proie pour l’ombre. Le capitalisme industriel tel que connu au siècle dernier (le vingtième) ne représente plus, à mon avis, le danger majeur. Dans EADS ce n’est pas la face fabricante qui me gêne. Elle crée des centaines d’emplois, fait fonctionner des dizaines de sous traitants, crée une dynamique innovationnelle intéressante. Ce qui me gêne au plus haut point c’est la face financière de l’entreprise. Celle qui n’a pour seul but que de retirer individuellement le maximum de fric de l’organisation, cyniquement désintéressée par l’avenir de cette dernière. La face prédatrice qui, loin de créer quoique se soit de collectif, se concentre sur l’intérêt strictement personnel des possédants ! Après moi le déluge !
Comme les capitalistes sont toujours mariés avec le pouvoir politique, jadis (hier !) les industriels- les mythiques « maîtres des forges »- négociaient des commandes, des subventions, des dégrèvements d’impôts. Souvent ces passe-droits finissaient, du moins en partie, dans l’entreprise (investissements) et dans l’embauche ou des gains de salaire. Les trente glorieuses célébrées par J. Fourastié ont ainsi associé l’Etat, les patrons et les salariés dans un progrès incontestable et relativement partagé.
Les capitalistes de la finance, eux, font de la connivence avec le pouvoir des sources de ponctions plus directes et, surtout, plus personnelles. Au travers des grands groupes, ils procèdent à une extorsion de l’argent public à des fins d’enrichissement personnel. Comprenez-moi bien. Que des actionnaires plus ou moins initiés vendent leurs actions EADS, je m’en fiche largement … à condition que les acheteurs soient d’autres boursicoteurs. La bourse est ainsi faite qu’il faut qu’il existe des gagnants et des perdants, d’une part, et que, d’autre part, dans ce monde, on accepte une information déséquilibrée par nature. Non, ce qui me révolte réside dans la manœuvre qui consiste à faire acheter au plus haut les actions des initiés par la CDC, c’est-à-dire par l’argent public ! Une sorte de privatisation de l’Etat au profit d’individus ayant développé des réseaux puissants.
Essayons donc, pour la qualité de notre action, de distinguer le capitalisme industriel (souvent constitué d’entreprises de grande ou moyenne dimension), du capitalisme financier (souvent transnational), même si pour avancer ce dernier utilise le masque du premier. Une sorte de capitalisme janusien, dont il convient de décrypter la logique dominante. Dès que cette discrimination faite, on s’aperçoit que des modes d’organisation alternatifs existent (associations, coopératives, mutuelles, … ) qui peuvent représenter des contre-feux viables.
2 • Il faut réhabiliter la notion de classe sociale. L’abandon idéologique de ce concept représente une erreur grave. Il réduit l’homme à un individu (libéralisme) en refusant qu’il soit aussi et peut-être surtout un être social (socialisme). Quand, aujourd’hui, le travailleur de chez Renault s’en prend plus naturellement à l’instituteur qu’au dirigeant de Dassault, ne cherchez pas plus loin l’effet de la corrosion capitaliste. En gommant la conscience de classe chacun ne se réfère plus qu’à un ressenti personnel formaté par les medias. De la sorte, les représentations subjectives collectives sont passées d’une conscience de classe à la projection d’un devenir individuel. Salop d’érémiste qui travaille au noir, salop d’immigré qui croque de la sécu, salop d’instit avec ses vacances, salop de jeune qui n’a qu’à faire ses preuves … Et pourvu que je ne trouve des combines persos pour mieux m’en sortir qu’eux ! La non-conscience de classe fait que le regard de l’individu se porte d’abord sur ses congénères « visibles » et non sur les prédateurs économiques « invisibles » au mieux, « érigés en vedette people » au pire. Il suffit à la classe prédatrice de sacrifier de temps en temps un bouc émissaire (Messier, Forgeard ou Lefloch-Prigent) sur l’autel de la rigueur capitaliste avec des « Pas de ça chez nous ! » outrés, pour se faire oublier. Le jeu du partage de la plus value, hier encore sur la table, devient un bonneteau unilatéral faisant prospérer une classe d’hyper riches. Et même politiquement, cette impasse de la classification a conduit (peut être inconsciemment) à une dérive. La gauche au pouvoir, de Bérégovoy à Jospin, s’est objectivement comportée en collaborateur de classe en oubliant quelles catégories faisaient son électorat. Afin de ne pas être suspecte de privilégier les « publics partisans et captifs » elle a donné la main à ceux qui ont patiemment construit leurs réseaux (Bouygues, Dassault, Lagardère, Arnault,..) avant de se doter d’un relais acquis, au sommet.
La disparition des frontières de classe explique aussi un phénomène très contemporain, l’’ Ouverture ». DSK ne s’est-il jamais assimilé dans un habitus (je fais encore du Bourdieu, mon cousin occitan va me chambrer !) de classe moyenne ? Et Kouchner ? Et Lang ? … Dis-moi ton habitus, je te dirais ta capacité de résistance aux sirènes de la renommée !
Enfin, l’incapacité à se projeter collectivement nourrit le conservatisme communautariste. Comme le dit Rozès (Stéphane Rozès : « Où en est la conscience de classe en France ? ») « Il faut qu’à l’avenir, les citoyens se sentent co-propriétaires de ce qui se fait » avec la capacité de savoir discriminer les ennemis avérés de cette quête. Si l’intégration a revêtu un certain succès précédemment c’est aussi dû au fait que les classes ont « digéré » les apports extérieurs sur les fondamentaux de leur référentiel. Aujourd’hui, la plupart des immigrés ne se retrouvant pas dans une entraide de classe, trouvent difficilement les ponts ou les gués de transit vers la « normalisation » sociale. Ils se réfugient par défaut dans une référence communautaire qui les identifie.
Une autre idée m’a interpellé. Mais il me faut la décanter. Suspense !...
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27/09/2007
CONTRE L'OBSCURANTISME ÉCONOMIQUE
Comme le rugby me gonfle, je vais revenir à l’économie.
D’abord pour jubiler, puisque, enfin, on daigne s’intéresser à elle ! Le CNRS, d’habitude assez méprisant pour les « sciences de l’homme » ou « sciences molles », donnant sa médaille à un économiste » (de mémoire je crois que dans cette catégorie seul Bourdieu a obtenu le trophée), c’est énorme. Les reboussiés diront qu’il s’agit en fait d’un physicien dépravé ayant fait X-ponts mais, à sa décharge, l’impétrant a aussi touché à la sociologie des organisations ce qui ne saurait nuire à un manieur d’équations. Comme vous vous demandez de qui je parle, je vous livre le nom de cet illustre inconnu des masses mais aussi des élites, Jean Tirole, qui fit ses débuts à Toulouse-con avant d’user les chaires du MIT. Comme on parle de lui pour le Nobel, mettez son nom dans votre répertoire, afin d’épater vos amis, … et pouvoir citer un économiste français si toutefois on vous posait la colle, la défausse banale « Raymond Barre » n’étant plus de ce monde !
Ensuite pour gueuler ! Je le rabâche à l’envi, tout un chacun parle, utilise, exploite soit disant l’économie … mais personne n’en a vraiment fait ! Il s’agit d’une sorte de jocker très utile lorsqu’on ne sait plus bien quoi dire, ou quoi inventer pour berner le quidam agriculteur corse, travailleur dauphinois, artisan auvergnat, patron basque, commerçant banlieusard ou chômeur en fin de droit. Il n’y a plus de sous ? Jocker ! On veut privatiser ? Jocker ! Trop de chômage ? Jocker !.... En vérité il faudrait dire « Pocker ! » puisqu’il s’agit d’un mix de bluff, de pari et de manip. Je n’ai pas les cartes voulues, mais je le fais croire ! Voire « Pocker-menteur » pour faire croire l’inverse de ce qui est …
Ainsi un certain François Fillon, premier ministre au chômage, fait peur dans les chaumières en jetant par dessus des calanques de Piana « L’État français est en faillite ! ». Croquemitaine ! D’abord remarquez l’excellente allitération des f « François Fillon, France Faillite, Fausse Franchise, Franche Fourberie» ! Pocker-menteur : « c'est vieux comme Thatcher, Reagan et Pinochet. On augmente d'abord le déficit public en allégeant les impôts des plus riches. On fait ensuite semblant de constater l'augmentation de la dette, qui doit être réduite, cela va de soi, c'est le bon sens, on nous le demande, on n'a même pas besoin d'expliquer pourquoi. Alors on coupe dans la dépense publique, diminution des services publics, des prestations de solidarité. Enfin, on privatise pour "désendetter" l'État, ce qui permet aux amis milliardaires de s'enrichir encore plus. On aurait bien voulu améliorer le sort des citoyens, mais on ne peut pas, vous savez bien, à cause de La Dette. (On devrait l'écrire avec une majuscule, tellement elle a acquis ce rang de divinité suprême omnipotente). Voilà comment on peut faire un bond de plus de 80 ans en arrière, sous les applaudissements des médias et des crédules.'' (cf http://dinersroom.free.fr billet du 22 septembre 2007).
Poker menteur, car un État ne peut être en faillite par principe. C’est ainsi ! D’ailleurs les titulaires de créances sur l’État français (actions, obligations, …) ne s’y trompent pas qui ne se précipitent pas pour fourguer leurs titres lesquels, le cas échéant, devraient voir leur cours s’effondrer. Conséquences à l’étranger ? L’accroissement du déficit public avait, à l’époque, la conséquence potentielle d’affaiblissement du taux de change monétaire sur les marchés extérieurs. Aujourd’hui rien de tel puisque l’euro n’est pas lié à la France uniquement. En regardant le cours de la monnaie européenne par rapport au dollar, nous ne sommes pas dans cette épure !
Arrêtez de nous prendre pour des paysans corses ! Arrêtons l’obscurantisme économique qui pèsent sur nos masses et qui permet de construire des croquemitaines inventés de toutes pièces par des dirigeants qui n’ont ni le courage de leurs opinons, ni la franchise de leur politique.
Si, par hasard, Tirole devenait prix Nobel d’économie, prions pour que l’on enseignât enfin dans les écoles, collèges, lycées, cette discipline non pour en faire une référence scientifique mais pour empêcher aux puissants d’en faire un voile, une burkha, un linceul !
11:24 | Lien permanent | Commentaires (0)
21/09/2007
RUGBY D'AVANT, RUGBY D'ARMAND
Mes proches, mes amis, bref tous ceux qui me connaissent bien, n’en reviennent pas ! J’en ai marre du rugby ! Un sadoul comme on dit chez nous. Pas encore un boumi, mais presque. Une overdose dixit les britiches !
En fait, je rêve d’un tournoi, un vrai, pas une Coupe du Monde pompeuse composée avec quelques îles (ou presqu’îles) du Pacifiques et de l’Atlantique (parfois grandes comme la Lozère) plus quelques pays alibis en garniture des cinq grands. Un tournoi qui resterait dans le giron des aficionados (et c’est déjà pas mal !) avec quelques sponsors (il faut bien que le trésorier exulte) et non l’inverse. Un rugby d’avant, comme l’illustre le génial Blachon ; ex troisième ligne du PUC, dans son bouquin « Rugby d’avant et d’après » (Editions : Le Cherche midi) que je vous recommande vivement.
Un rugby pour lequel les places seraient abordables financièrement et matériellement, sans « packs » onéreux et racketteurs, avec des boissons à prix normal et non au tarif mettant le demi au niveau du verre de Château Petrus bonne époque.
Les joueurs joueraient sans avoir le regard accaparé par les chiffres d’euros. Des joueurs qui ne vendraient pas des voitures, de l’assurance, des rasoirs ou autres téléphones sur les télés lancinantes pour « faire monter la pression ». Les vestiaires resteraient confidentiels, antres des recueillements, des craintes, des larmes ou des éclats de joie partagés. Ce sanctuaire des émotions viriles ne passerait pas à la une des images galvaudées en habillage de retransmission. Personne d’autre que « la famille » ne saurait ce qui est dit ou lu ou juré.
L’entraîneur serait entraîneur, c’est déjà beaucoup, sans espoir de troquer son survêt contre un maroquin sarkosien, en vendant de l’espoir sportif plutôt que de la préparation charcutière.
Un monde où Chabal serait rasé comme il sied aux déménageurs de pianos selon Danos et miserait plus sur l’abattage constant et lucide que sur une image fabriquée d’imbécile des steppes espérant figurer dans un calendrier pour notaires lubriques.
Un rugby qui ne serait pas investi de la charge d’alibi pour une croissance économique déliquescente. Ou d’ineffable galerie d’exotisme, version « bons sauvages », au travers d’hakas diffusés et exploités en boucle.
Un sport sans « adjuvants de forme » boostant les musculatures au détriment des QI, avec un coatching qui déresponsabilise l’effort puisant dans les réserves insoupçonnées de l’être.
Un rugby à la Vaquerin, dont on a inauguré la stèle à Béziers, solide comme du granit, savoureux comme un cassoulet, festif comme une virée toulonnaise, « Chentil » comme un frère d’amitié, simple parce que le sport « Che pas grave ! ».
Et si « le rugby d’avant avait disparu avec Armand ?
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