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22/05/2014

LA BROUTONIQUE

Autrefois, dans les troisièmes mi-temps rugbystiques, se chantait ce refrain occitan

      Anirem pas en Americo (Nous n'irons pas en Amérique)

      Es un trop sale païs (C'est un trop mauvais pays)

      Si beu que de la brutonique (On n'y boit que de la broutonique)

      A nosautres nos cal de pastis! (A nous autres il nous faut du pastis!)

Allez savoir pourquoi, ce refrain m'inspire une réflexion sur l'Europe et les élections afférentes.

Primo, il invoque la peur de l'ailleurs, du "progrès" mythique incarné - à l'époque - par les Etats Unis et ses innovations, contrastant avec une société encore majoritairement inscrite dans la ruralité. Idem aujourd'hui pour une Europe qui représente à nos yeux l'antichambre de la mondialisation et tous les inconnus qui s'y rattachent. Inconnu de l'étranger tout d’abord, ces immigrés source de fantasmes toujours vivaces. Voleurs d’emploi, délinquants professionnels, parasites de nos systèmes sociaux… nomades roms, plombiers polonais, maçons portugais,… Inconnu du changement ensuite. La France est championne du statu quo et les Français se battront jusqu’à leur dernier souffle pour conserver ce qu’ils ont, ce qu’ils sont, ce qu’ils connaissent. On peut le regretter mais c'est légitime. Anirem pas en Europe! Ainsi une floraison de listes "régionalistes" bretonnes, basques, catalanes, occitanes, réunionnaises marque à l'évidence ce désir d'ancrage dans le territoire (réel et imaginaire) de référence. En pays d'exil, même le printemps manque de charme.

Deuxio, la brutonique, tisane amère* à l'image de la potion de Bruxelles à base d'infusion d'austérité, d'équilibre budgétaire à recouvrer, de fonctionnaires à virer, le droit du travail à sabrer… On ressasse partout que l'euro s'avère trop fort et freine nos exportations, que les banques s'engraissent sur le dos des classes moyennes, que les grandes boîtes n'ont jamais autant fait de profits et débauché autant d'employés. Satanée Bruxelles, qui règlemente la chasse à la palombe, le matériau des plombs des cartouches, la taille des poissons, la hauteur des escabeaux, le calibre des chasses d'eau, le pourcentage de sulfite,..! Un carcan jugé excessif, voire exorbitant et, qui plus est, concocté par des eurocrates peu au fait des choses de la vie. Or, on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre! L'électeur maso qui assumerait la fameuse formule Churchillienne "du sang et des larmes" n'existe plus. Soit il va à la pêche le jour du scrutin, soit il vote pour un parti populiste ou un parti rigolo ayant le choix parmi les quelques vingt cinq listes présentées. Par exemple "Cannabis sans frontières", "L'Europe de Marrakech à Istanbul", "Europe, nous te ferons !", "Grand remplacement", "Syndicat de lutte contre les banques" et "Esperanto" !

Tercio, l'imaginaire produit par la propagande médiatique n'incline pas à un engouement pour ladite Europe. Les médias expliquent les avantages productifs de la Germanie, la rigueur de la Scandinavie, la probité des Baltes, d'un côté, soit rien qui ne fasse vraiment rêver le quidam. Hollande, qui n'en manque pas une, n'a trouvé rien de mieux que de faire un voyage promotionnel au bord de la Baltique avec l'ineffable Angela dans un décor baignant dans des brumes, le visage ruisselant sous la pluie battante, tandis que jouait une fanfare bavaroise. Ça file vachement envie!! De l'autre côté, l'Espagne endettée a gusto, le Portugal guère mieux et la Grèce un pied dans le précipice. Le tout sous la férule des Goldman Sachs boy's. Que du bonheur! Es un trop sale païs, dit la chanson… Anirem pas!urne.jpg

Quatro, les candidats mis en piste par les "grands" partis ressemblent beaucoup à des deuxièmes mains, c'est à dire des gens que l'on met là parce qu'on ne savait pas trop quoi en faire! Des planqués, des recasés, des repêchés, des exfiltrés, des récupérés, des vieux briscards des interstices politiques. Un étal pas très engageant somme toute! Avec des "clips" à la télé dignes d'une campagne électorale du Kyrgyzstan où des chevaux de retour ânonnent (en prenant les auditeurs pour des débiles légers) des textes convenus.

Enfin, pour accroitre le doute, la Russie poutinienne met en exergue que l'Europe reste un fragile acteur, incapable de faire front sitôt que le ton monte. Banquier beaucoup, commerçant un peu, guerrier pas du tout, tel se présente aujourd'hui l'acteur étoilé.

Anirem pas en Americo! Pourtant, elle vient à nous! Derrière cette élection et malgré les efforts pour l'occulter, se profile le fameux traité TTIP (Transatlantic Trade Investment Partnership), de libre-échange, ou TAFTA (Transatlantic Free Trade Area) pour brouiller les cartes. La broutonique imposée, le Roquefort pasteurisé, le maïs trangénisé, le poulet javellisé, le cassoulet lyophilisé, …

Je viens de brosser un portrait de l'état d'esprit du commun des mortels français en cette veille d'urnes languissantes. Rien de plus.

Cette apathie pour ne pas dire ce désenchantement est-il un bien, est-il un mal? Je ne saurais m'engager à prendre vraiment parti, à court d'arguments autres que des paris risqués. Trop risqués pour nos enfants. Certes le progrès des trente glorieuses avait des nuisances. Mais il fournissait à foison du mieux vivre. Ce n'est plus le cas. Simplement je crois que trop de pro européens s'en mettent plein les poches sur le dos des pseudo européens qui se serrent la ceinture jusqu'à étouffer. Et l'avenir qui sert d'horizon à cette spoliation n'apparaît même pas attrayant!

Comme le bac arrive je vous livre cette pensée de Cioran qui résume (peut être) les choses: "On ne demande pas la liberté, mais l'illusion de liberté. C'est pour cette illusion que l'humanité se démène depuis des millénaires. Du reste la liberté étant, une sensation, quelle différence y a-t-il entre être libre et se croire libre ? "

* il s'agissait en fait de stigmatiser le Coca Cola jadis majoritairement assimilé à une tisane au goût médicamenteux.

30/04/2014

SAUREL ET LES OUTSIDERS

La victoire de Saurel aux municipales de Montpellier reçoit des explications simples, voire simplistes, en terme de marketing politique. Pour ma part elle me porte à une analyse qui, semble-t-il, a échappé aux divers commentateurs. Analyse qui utilise la théorie dite des "insiders-outsiders", théorie économique issue de la Nouvelle Économie Keynésienne qui permet d'expliquer certaines rigidités sur le marché du travail, avec les travaux des économistes Assar Lindbeck et Dennis Snower*.

Ce modèle transposé à la politique sépare les publics insiders qui sont les personnels politiques permanents, les affidés et les électeurs captifs d'un parti et les outsiders représentant les postulants et publics flottants, c'est à dire les exclus des sphères décisionnelles ainsi que ceux dont le vote ne répond pas à une stricte logique de clan, voire d'idéologie. Les partis institutionnels supputent un degré d'adhésion assez fort de ces derniers à leurs mots d'ordre. Il existerait ainsi un "vote" socialiste, un "vote" UPM,… qu'il suffirait de solliciter pour qu'il se manifestât. Ainsi le candidat Mourre, investi par le Parti Socialiste comptait sur un pourcentage important d'électeurs qui suivrait "mécaniquement" l'adoubement de la rue Solférino.

Or, l'analyse en termes d'insiders/outsiders insiste sur le rôle de l'action des insiders, qui disposent de moyens de pression significatifs sur la marche du parti. Formant un cercle solidaire, ils procèdent à une allocation affidaire des postes de pouvoir et de prestige. Conscients de leurs avantages, ils tentent d'écarter tous les risques potentiels qui mettraient en cause leurs prérogatives. Pour cela ils jouent sur les arcanes juridiques, exercent des pressions d'alliances, mobilisent des réseaux (philosophiques hier, sociaux aujourd'hui), dressent des barrières d'entrée. A faible dose, cette politique d'insiders ne provoque qu'une vague récrimination des foules électorales. A forte dose – souvent à l'issue d'une détention longue du pouvoir par un clan – elle devient d'autant plus insupportable que les individus "en place" s'arcqueboutent à l'excès sur leurs acquis. A Montpellier, ce "gel" des insiders résulte l'une longue ère fréchiste cumulant jusqu'à trois "générations" d'insiders!MourreS.jpg

Après cette longue ère, les directions Parisiennes ont accentué l'affaire par une manœuvre destinée à provoquer l'abdication de la maire sortante, par une organisation contestable de primaires (barrière d'entrée), plus des prises de positons également contestables quant à la transparence des décisions. Cela s'est fait tantôt au premier degré, c'est à dire au vu et au su de tout le monde. Tantôt au second degré, les politiques en place jouissant d'un protectionnisme de plus en plus évident, générant une rigidité bloquant le renouvellement par les outsiders "aspirants". Les insiders profitent ainsi, aux yeux du public, d'une véritable rente de situation limitant le turnover sur les postes attributifs d'avantages tant financiers que d'image (sénateurs, députés, maires, présidents, conseillers…). Cette confiscation de prérogatives se vérifie à tous les niveaux des partis avec une mise en exergue par les médias. Le protectionnisme dont bénéficient ces privilégiés,… trouve, de plus, des échos dans les enquêtes menées par les médias d'investigation au niveau national et qui se répliquent au niveau régional, local. A l'évidence, pour la marché politique, les insiders privilégient selon ces manœuvres, leur intérêt individuel avant le bien collectif ou public. Le refus de suppression du cumul des mandats, de la simplification du "mille feuilles" administratif,… toutes choses permettant de fluidifier l'accès aux postes intéressants détenus ou cooptés par le parti, corroborent cet opinion.  

Or, nous vivons dans un environnement de crise condamnant plus sévèrement ces pratiques protectionnistes peu charitables pour les outsiders et exaspérant les modestes insiders (ceux qui n’ont droit qu'à des miettes alors qu’ils vivent souvent assez mal) tout en modérant leur combativité sociale et politique (étiquetés comme des gens-qui-n’ont-pas-à-se-plaindre-comparé-aux-autres). Voilà ce qui mine les ex tribus militantes, leurs membres ruminant les manipulations, les passe-droits, les copinages impudents des rentiers de la politique.

Résultat, il se produit un spilling out, un déversement vers l'extérieur, de partisans hier acquis à la cause, vers le statut de outsider. C'est le premier volet "négatif"  occasionné par l'effet de confiscation démocratique opéré par les insiders. Cela se traduit, au niveau national par le désamour vis à vis d'Hollande et du premier cercle (Cahuzac, H. Désir, Morelle, Promotion Voltaire de l'ENA,..), ici la fonte comme neige au soleil du réservoir de voix potentiel de Mourre et de Domergue, porteurs des mêmes maux. Au P.S.. On pourrait faire le même constat à droite.

Second volet, le flux de déversement où va-t-il? Pour une bonne part, vers un "chômage électoral" en d'autre terme l'abstention dit vote "passif". Ou bien, vers une bassin de rétention "naturel" (c'est à dire acceptable idéologiquement) qui se propose aux déçus.

Localement, Saurel,  a offert un usage "actif" du bulletin de vote sans trahir la tendance idéologique foncière. En effet, ledit Saurel, classé de centre gauche historiquement, à été estampillé compatible avec le centre droit par les médias, via une alliance possible avec Domergue. L'espace de déversement n'avait plus qu'à se remplir avec les outsiders actifs frustrés, issus de droite comme de gauche. Beaucoup plus qu'au charisme et aux mérites du candidat dissident, il faut attribuer à cet effet de spilling out les raisons de sa victoire.  Au travers de l'éviction du candidat Mourre c'est l'éviction des insiders qui s'est manifestée massivement.

Au niveau national, ces bassins de substitution s'appellent Front National pour la droite**. La montée en puissance de ce parti doit beaucoup à l'effet d'outsiders basé sur le ras le bol du verrouillage de l'UMP. Le centre, lieu par hypothèse destiné à recueillir les déversements des deux côtés, malgré ses tentatives plus ou moins heureuses (Tapie, Bayrou, Borloo) ne paraît plus un réceptacle significativement attrayant.

Quid donc du bassin de rétention des outsiders  de gauche ? Actuellement il n'existe pas vraiment, puisque le Parti de Gauche s'est positionné en frontière signalétique de la doxa socialiste, ce qui rebute les modérés. Résultat: une forte abstention (chômage électoral) et un prévisible éclatement du PS en deux morceaux afin de se repositionner "utilement" dans le marché politique.

Tous ces jeux de pouvoir seraient dérisoires s'ils ne concernaient notre vie quotidienne et ne conditionnaient notre avenir. Les valeurs et les compétences nécessaires à la bonne gouvernance des institutions (locales ou nationales) méritent mieux que des guerres mesquines et intestines "pour vivre à la Cour" comme on disait sous les rois de France. Richard III pour sa part s'écriait "Mon royaume pour un cheval!". Les insiders pensent "Mes valeurs pour un siège!". C'est tout aussi affligeant.

 

* Assar Lindbeck et Dennis J. Snower. La théorie insider-outsider emploi et le chômage. The MIT Press, Cambridge, MA, 1988. André Noy. Réflexion sur les relations entre gestion des ressources humaines-chômage-formation». Revue de l'Economie Méridionale. Vol 40. N° 159. 1992.
** le mécanisme de déversement a fonctionné à Béziers où Ménard astucieusement "décalé" du FN a fourni un bassin de rétention aux nombreuses voix  revendicatives.

07/04/2014

SOCIÉTÉ À MÉMOIRE DE FORME

Les matériaux à mémoire de forme ont la propriété exceptionnelle de pouvoir se déformer puis de retrouver après usage la forme originelle.

La société française possède métaphoriquement cette propriété. Tel ou tel secteur fait problème, telle ou telle information paraît gravissime, tel ou tel indice est mauvais (rappelez-vous des AAA!),… quelques semaines (voire jours) plus tard et il n'y paraît plus. Le système a retrouvé son erre et c'est comme si rien ne c'était passé. En témoigne le "nouveau" gouvernement: la France des électeurs attendait le changement qu'elle appelait dans les urnes. Résultat, on retrouve des ministres mitterrandiens de 33, 23 et 22 ans en arrière (Fabius, Sapin, Royal) dont les deux derniers aux mêmes fonctions ! Rétractation sur des positions préalable, soit le type parfait de procès mémoire de forme.

Un fait chasse l'autre et rien ne bouge vraiment. Vous verrez, l'agitation des municipales, s'atténuera rapidement et tout recommencera quasiment à l'identique. En fait le fond sociétal reste similaire, recouvert par une mince couche de "glaçage" comme on dit en cuisine qui fait oublier ledit fond. Le foot, les salaires des sportifs, les Ferrari des vedettes, la téléréalité, les révélations d'alcôves, les faits d'actualité,… constituent ce glaçage superficiel qui masque le chômage, la baisse des retraites, l'érosion du pouvoir d'achat, le sida, le cancer, la pollution, la violence, la crétinisation des gamins,.. Passe encore si le fond sociétal s'avérait simplement correct. Hélas la soupe devient de plus en plus amère et la mémoire de forme ramène inlassablement à cet état. Entre le fond et le glaçage, prospère une couche de crème faite de tous ceux qui se gavent en fustigeant les soutiers qui ne seraient pas au niveau des saxons ou pas aussi souples que les anglos. Allez les gars! Au turbin et au bassinet, diplôme ou pas, homme ou femme, génie ou médiocre, jeune ou vieux.

L'idéologie libérale nous explique que tout cela est normal car ça pourrait être pire! D'autres nous expliquent que la France constitue une "société bloquée". Non! Pas bloquée mais à mémoire de forme ce qui contribue toutefois au même résultat. Et les élections, ne servent qu'à rouler les promesses le temps de la campagne, pour s'écrouler le lendemain des résultats, Sisyphe revu et corrigé par la démocratie moderne.

La mémoire de forme c'est bien et pas bien. Dans les environnements conservateurs le procédé s'avère parfait. Les traditions sont maintenues, les us et coutumes perdurent malgré quelques déviances qui sont rapidement "digérées". Les sociétés traditionnelles excellaient dans ce fonctionnement qui ramenait inlassablement les choses à leur état précédent. Ce n'est pas bien dans un univers "compétitif" car cela éteint les velléités d'innovation. Ainsi, selon le diagnostic du groupe DEI "la société française est majoritairement réfractaire au changement, peu sensibilisée aux enjeux liés à l’innovation, et fortement imprégnée d’une culture à dominante patrimoniale conduisant à une allergie au risque,  les publics les plus susceptibles de fournir les futurs entrepreneurs de notre pays sont mal informés sur les dispositifs existants et, le plus souvent, pas ou mal formés à l’innovation, les entrepreneurs, souvent victimes d’un manque de culture managériale, sont pénalisés par des structures d’accompagnement aux performances très inégales"*. Sans vouloir jouer de la théorie du complot, les dirigeants de la couche crémeuse, n'ont pas vraiment intérêt à un changement profond dont, inconsciemment ils craignent de n'être pas bénéficiaires. Aujourd'hui, la normalité est devenue le déguisement de la passivité. Il ne faut pas espérer plus de la majorité des français ayant voté Hollande. Normal, on ne fait pas grand-chose, on ne bouge rien pour ne pas risquer… Risquer quoi, personne ne le sait vraiment mais on a peur. Changer, innover, créer,… impossible on est normaux! Alors on bricole et on roumègue. On raccommode les rideaux pour ne pas voir la réalité à la fenêtre. On ne voyage pas ou si peu pour éviter de rencontrer l'autre, le différent, celui qui n'a pas les mêmes infirmités intimes. Et on tourne dans la cage à écureuil, artisans plus ou moins conscients d'un système dont profite vraiment un groupe-secte transnational.mdef2.jpg

La rigidité des gouvernants rejoint en quelque sorte la passivité des foules en utilisant la cupidité des "crémeux". Ainsi tout l'art de gouverner se réduit à tirer parti des ennemis que l'on se fait par l'imprévoyance, la sottise et la vanité. Une vue sommaire des causes, un contrôle sévère, un mépris tranquille arrêtent aussitôt cette politique de vieux enfants, comme on l'a vu, comme on le verra. Et sans que les hommes changent beaucoup. Car ce n'est pas difficile. Seulement ce qui est difficile, c'est de croire que ce n'est pas difficile"** Alors, qu'on ne s'étonne plus du taux d'abstention ni du vote protestataire: les électeurs sont à juste raison persuadés que quoiqu'ils fassent les choses reviendront au même point! La démocratie n'est plus un choix, c'est une mascarade avec une seule possibilité quoiqu'il arrive, le retour au libéralisme des marchés (financiers, économiques, politiques).

Alors faut-il faire ou attendre la révolution? Peut être, mais là encore il serait nécessaire que les idéologies fournissent des horizons plus attrayants et satisfaisants. Regardez les printemps arabes: les discours chimériques ne changent pas la réalité infernale***. Sinon le risque réside dans la récupération du renversement de table par des forces aussi malsaines, voire pires que les actuelles. Est-ce aux intellectuels, est-ce aux organisations populaires de s'atteler à ce travail de Titans? De la réponse à cette question dépend l'ouverture du cercle sisyphéen de la société à mémoire de forme actuelle et de son implacable drame. "Face à la trahison de ses élites, protégeant leurs droits mais refusant d'assumer leurs devoirs, face à l'incapacité coupable des politiques, centrés sur eux-mêmes et ignorants du monde, impuissants désormais à assurer le bien-être collectif, c'est la démocratie elle-même qui est en danger."**** Mais la démocratie n'est-elle pas aussi à mémoire de forme?

  

* voir le rapport du groupe de travail "Défi de la citoyenneté" de FutuRIS (phase 1) présidé par B. Chevassus-au-Louis: Socialiser l’innovation : un pari pour demain, mars 2004
**Adonis. Printemps arabes. Religion et Révolution. Ed de la Différence. 2014.
*** Alain. Mars ou la guerre jugée. "Les classiques des sciences sociales". Site web: http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html
**** Matthieu Pigasse L'éloge de l'anormalité. Plon 2014.